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S.E. 3131 Gouverneur
En 1957, l'Alouette 2 était déjà bien lancée et il fallait songer à renouveler ce produit pour continuer sa réussite commerciale et satisfaire ses utilisateurs. C'est alors que René Mouille eût une idée : caréner l'Alouette 2 pour lui donner nouvelle allure et personnaliser en quelque sorte la machine pour une clientèle spécifique. Il fit appel pour cela au célèbre styliste Raymond Loewy, connu pour ses habillages automobiles, notamment la DS de Citroën. L'appareil ainsi vêtu présentait tout de même un inconvénient majeur. L'habillage s'avéra trop lourd et l'Artouste II était alors insuffisant pour la masse totale de l'hélicoptère. Il n'y eut jamais de fabrication série car outre ce handicap, le capotage d'entrée d'air du moteur provoquait des sillages importants gênants pour la stabilité en vol de croisière.
Sa cabine, insonorisée, assez vaste, pouvait emmener quatre passagers et un pilote. Cette unique version restée expérimentale était tout de même de niveau VIP. Les parois intérieures étaient capitonnées, et de la moquette recouvrait son plancher. La banquette arrière passagers possédait des appuie-tête et un accoudoir central rabattable. Le Gouverneur était à l'époque l'ébauche de l'hélicoptère de luxe actuel. Le prototype 01 (F-WIEA) était en fait une Alouette II de série reconfigurée. (ex S.E. 3130 S n° 1055 F-BIEJ).
Bien que n'ayant que 12 heures effectives de vol, l'appareil fut quand même présenté officiellement au XXIIème Salon du Bourget , le 30 mai 1957 par Jean Boulet. Le programme prévu des essais en vol étant clos, le SE 3131 emmena à son bord son premier hôte de marque le 14 décembre 1957. En effet, Jean Boulet eut l'honneur de voyager avec le président de la république René Coty sur le trajet Rambouillet-Orly, où ce dernier devait accueillir son homologue américain le président Eisenhower, en visite en France.
Après cette prestation, l'appareil retourna chez Sud-Aviation pour définir les différentes phases d'expérimentation de la cellule afin de définir plus clairement la silhouette de la future Alouette III. Le pilote d'essais "maison", Jean-Marie Besse (1) fut chargé d'évaluer, sur le Gouverneur, les nouvelles pales plastiques préconisées pour la série de l' Alouette III, d'ores et déjà imaginée par les bureaux d'études.
En ce début d'année 1958, Sud-Aviation était tributaire des délais de livraison du Djinn et des nombreuses Alouette 2 en commande, avec de surcroît, l'étude pour le lancement de l'Alouette III et du nouvel hélicoptère lourd Frelon. Toutes ces charges cumulées firent qu'on délaissa le Gouverneur qui fut remis au standard Alouette II, devenu plus tard un SA 3180. L'appareil était élégant, mais les améliorations à apporter et les coûts de production auraient pris trop de temps et les délais impartis par le cahier des charges, trop courts. D'où abandon du SE 3131… fugace.
> caractéristiques générales du SE 3131 <
S.E. 3140
Le 16 mai 1957, Sud Aviation fit voler pour la première fois une Alouette 2 spéciale équipée en "banc d'essais volant". Il s'agissait d'étudier sur ce prototype la charge rotor du futur Frelon par l'adaptation d'un rotor tronqué aux extrémités de pales, ramenant son diamètre à 8,40 m. Cette modification permit d'augmenter la vitesse rotor et d'effectuer divers atterrissages en autorotation rapide. Le SE 3140-01 (F-WIEB) était doté d'un moteur Turboméca Turmo II à turbine libre qui ne donna pas les résultats espérés, étant bien en dessous des performances exigées par le constructeur. Son passage au CEV de Brétigny ne fut pas non plus concluant, obligeant Sud-Aviation à transformer de nouveau l'appareil en SE 3130S.
S.E. 3150
Encore une Alouette 2 modifiée. Ce précurseur du Lama actuel était à l'époque exceptionnel car il se composait d'une cellule normale de SE 3130 et d'une chaîne mécanique d'Alouette 3, alliant puissance et légèreté. Deux exemplaires furent construits sur une commande d'état en vue du lancement de l'Alouette 3.
Le 001 F-ZWVN prit l'air pour la première fois le 11 mars 1958. Muni d'un rotor principal agrandi (11 m), d'un rotor anti-couple tripale et d'une boîte de transmission renforcée il était apte à tenter l'épreuve du record d'altitude grâce à ses atouts. Ce qui fut fait sur le 002 par Jean Boulet sur le terrain de Brétigny.
Le record à battre était détenu par les États-Unis qui avaient atteint 9076 m sur hélicoptère Cessna YH-41. Il fallait faire mieux !
Le 3150 fut allégé le plus possible. On remplaça une porte par un panneau translucide en plexiglas. Au réservoir d'origine on substitua un réservoir plus petit ne contenant que le carburant nécessaire pour la montée, et pour gagner encore quelques précieux kilos, le démarreur sera démonté après la mise en route de la turbine. Côté rotor, des manchons de pales en duralumin remplacèrent ceux d'origine en acier, plus lourds. Le taux de compression du turbomoteur fut augmenté en conséquence pour gagner de la puissance en altitude, et tous les instruments de bord non indispensables furent impitoyablement supprimés.
Jean Boulet subit un entraînement intensif en caisson de décompression simulant la pression atmosphérique supportée à 12000 m. L'homme et la machine fin prêts, la première tentative eut lieu le 9 juin 1958 à la verticale du terrain de Brétigny-sur-Orge avec une montée à 9583 m, non homologuée ce jour-là. Cette altitude fut dépassée le 13 juin avec 10984 m, toujours par Jean Boulet, avec cet hélicoptère ne pesant que 827,500 kg. Par la même occasion il s'adjugea aussi trois records de vitesse ascensionnels chiffrés comme suit : - 3000 m en 05 mn 30 sec. - 6000 m en 11 mn 13 sec. - 9000 m en 17 mn 43 sec .
Quatorze ans après, sur un appareil similaire, Jean Boulet battra son propre record en atteignant 12440 m avec un SA 315 B Lama, au-dessus de la base aérienne d'Istres.
©Aérostories, 2001.
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