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Il fallut
attendre la "redécouverte" du procédé par René Leduc
pour que la tuyère thermopropulsive prenne enfin vie. Le statoréacteur
a pu sembler le moteur idéal, en particulier pour la conquête
des hautes vitesses. Il est vrai que ses atouts ne sont pas minces.
L'absence de pièces mobiles, un coût plutôt faible en raison
de sa simplicité de construction, une consommation en carburant
très inférieure à celle des fusées, sans compter son adéquation
aux vitesses élevées, autant d'éléments prêchant pour sa faveur
et expliquant sans doute l'acharnement de René Leduc de le
voir s'imposer dans le monde de l'aéronautique.
Pourtant, le statoréacteur souffre d'un défaut majeur et difficilement
réductible: son incapacité à faire décoller seul un quelconque
engin volant. Un appareil équipé de ce mode de propulsion se voit
donc nécessairement soit largué depuis un appareil porteur, soit
équipé d'une propulsion mixte assurant son décollage, voire
encore catapulté depuis un chariot spécial, ce qui, force est
de le reconnaître, complique singulièrement sa mise en œuvre.
Néanmoins, le statoréacteur n'a pas disparu de la scène aéronautique
avec les Leduc et les "Griffon" de Nord-Aviation, ces
derniers dotés d'un combiné turbo-stato.
Des organismes comme Sud-Aviation, Nord-Aviation ou l'ONERA
comprirent rapidement le parti qu'elles pouvaient tirer du
procédé, des vitesses supérieures à Mach 3,5 étant difficilement
envisageables avec un turboréacteur utilisé seul. Dès le début
des années cinquante furent conçus différents missiles tactiques
à propulsion par statoréacteur, accélérés par des fusées à poudre.
Un exemple de ce système: l'actuel missile air-sol ASMP (Air-Sol
Moyenne Portée) de Matra-Aerospatiale.
Pour autant, l'avenir du statoréacteur ne se limitera peut-être
pas aux seuls missiles. De part et d'autre de l'Atlantique,
nombre de chercheurs semblent considérer qu'un avenir brillant
se profile pour des moteurs combinant turboréacteur au décollage,
statoréacteur pour des vitesses largement hypersoniques, et fusée
lors de passages hors de l'atmosphère. Le statoréacteur interviendrait
pour des vitesses supérieures à Mach 3 (rappelons qu'à ce
jour, l'appareil à propulsion atmosphérique le plus rapide
demeure le SR-71 à Mach 3).
Ce concept a été étudié en particulier pour envisager la création
d'avions "orbitaux", capables de s'affranchir
seuls de la limite entre l'atmosphère et le vide qui délimite
la nouvelle frontière pour l'aviation du XXIème siècle, visant
à se passer des forts dispendieux lanceurs-fusées.
Malgré l'échec relatif de Leduc, le statoréacteur fait donc
école. Il est à noter que si Américains et Russes étudient de
près ce type de réacteur, la France qui a toujours été à la pointe
dans le domaine des statoréacteurs dont elle est l'initiatrice,
conserve une place prépondérante dans ce domaine où les projets
ne manquent pas. La fin des Leduc ne signifie donc pas pour autant
la fin des statoréacteurs, promis à un bel avenir dans le domaine
des hypervitesses (supérieures à Mach 5) où les turboréacteurs
sont inopérants.
© Aérostories,
2000
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