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Le turbocompresseur

par Philippe Bauduin

La première turbine à air que l'on connaît a été construite 150 ans avant notre ère à Alexandrie. Elle était constituée d'une grande cheminée verticale qui, par tirage naturel, actionnait un tourniquet mettant en mouvement des pictogrammes mythiques.

Il faudra attendre le développement de l'aviation, voici un siècle, pour que l'on s'intéresse à la turbine à air ou à gaz d'échappement pour suralimenter les moteurs.  Plus que la course au rendement, c'est la raréfaction de l'air en altitude qui conduira à adapter le compresseur durant la Première Guerre mondiale.  C'est le Français Rateau qui en 1916 proposera de monter des compresseurs de suralimentation.  Deux techniques seront exploitées, soit un compresseur couplé sur le moteur, soit par récupération des gaz d'échappement après détente au travers d'une turbine.  La première, le couplage sur l'arbre moteur, sera rapidement abandonnée car, à partir d'une certaine altitude, la puissance absorbée par le compresseur sera supérieure au gain attendu.  La seconde, le turbocompresseur, en mettant à profit l'énergie des gaz d'échappement, apporte au contraire un gain de puissance au moteur.

Parmi toutes ces machines suralimentées, deux d'entre elles, le 12 septembre 1942, s'affronteront dans un combat singulier et unique pendant la guerre, à très haute altitude: 44 000 pieds soit plus de 13 000 mètres, Ce jour-là, un Junkers 86 allemand à moteur Diesel 2 temps compressé décolle, piloté par Horst Götz que l'on retrouvera plus tard aux commandes de l'Arado 234, pour un bombardement de Bristol.

Il est intercepté au-dessus de Christchurch par un Spitfire stratosphérique à moteur Rolls Royce à carburateur compressé, piloté par l'as britannique de la RAF, le prince Emmanuel Galitzine, descendant de la grande Catherine de Russie.  Ils sont à 44000 pieds et c'est la première fois qu'un combat aérien se déroulera à cette altitude où l'air est rare pour les moteurs mais surtout pour les pilotes.

Ce combat durera 45 minutes, ce qui est extrêmement long.  Il n'y aura ni vainqueur ni vaincu et H. Götz se posera à Caen-Carpiquet épuisé.  Après l'exploit de Mario Pezzi en 1939, la démonstration était faite que les très hautes altitudes étaient accessibles pour les hommes et les machines.  Ce combat restera unique dans l'histoire des batailles aériennes de la Seconde Guerre. On notera en passant que les moteurs Diesel d'avion de l'époque avaient un rapport puissance/poids supérieur à celui des moteurs à essence.  On comprendra mieux maintenant pourquoi on s'intéresse à nouveau, aujourd'hui, au moteur Diesel pour l'aviation légère.

Le turbocompresseur pour le recyclage des gaz d'échappement est largement utilisé sur de nombreux véhicules terrestres.  Introduit pour la première fois par Saab sur des camions en 1967, c'est Renault, qui en gagnant le Grand Prix de France en 1979 avec une Formule 1 pilotée par Jabouille, assurera la promotion du turbocompresseur pour les voitures.

© Aérostories, 2000.

Un turbocompresseur
"der Adler" de 1943.

J.E. Johnson devant son Spitfire Mk IX turbocompressé.

IWM

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