|
Avant que
de consacrer son existence aux recherches sur l'aviation,
Samuel Pierpont Langley, né en 1834, s'était distingué par
ses travaux de physique et d'astronomie, publiant un ouvrage
sur Le travail interne du
vent et des
Recherches sur l'aérodynamique.
Cet éminent personnage, secrétaire de la très savante et réputée
Smithsonian Institution
de Washington, ne pouvait rester étranger à la vague qui semblait
vouloir donner des ailes au XIXème siècle finissant. S'intéressant
de près aux travaux de Clément Ader et d'Otto Lilienthal,
il se mit en devoir de construire des modèles réduits volants,
mus par des moteurs à élastique et ayant la particularité de disposer
généralement d'une double voilure en tandem.
Cette disposition avait été inventée précédemment par Walker et
Brown, mais Langley ne s'écarta pas de ce type de voilure
pendant une dizaine d'années et construisit nombre de modèles
sur ce type, si bien qu'on lui attribua assez rapidement le
nom de "type Langley". Si Ader devait emprunter au latin
pour le terme "avion" (de "avis", oiseau),
Langley nomma tous ses appareils du même nom "aérodrome"
(du grec "aerodromoï", coureur des airs).
Il construisit lui-même son "aérodrome N°5" avec lequel
il obtint un certain succès. Le 6 mai 1896, son appareil de 4,10m
d'envergure, d'un poids d'environ 145 kg, toujours
à deux voilures en tandem, propulsé par deux hélices placées entre
les plans de voilure et actionnées par un moteur à vapeur de 1ch,
effectua un vol (sans pilote) de plus d'une minute et se posa
sans dégâts, à tel point que l'expérience put être réitérée
à diverses reprises, sous les yeux d'un autre savant de l'époque,
Graham Bell, l'inventeur du téléphone et qui ne tarira pas
d'éloges en narrant cet exploit.
Langley avait opté pour une technique bien particulière quant
au décollage. Considérant qu'il accroissait ses chances de
récupérer un appareil intact en leur faisant effectuer leurs essais
au-dessus de l'eau, il les faisait catapulter d'un "house-boat"
ancré sur le fleuve Potomac.
En 1898, les Etats-Unis entraient en guerre contre les Espagnols
en Amérique Centrale. Le Congrès octroya 50 000 $ à Langley afin
qu'il construise un aéroplane à moteur contrôlable. Samuel
Langley se heurtait aux mêmes difficultés que la plupart de ses
rivaux: la difficulté à se procurer un moteur suffisamment puissant
et léger. Il fit appel à l'ingénieur Charles Manly qui conçut
un moteur en étoile de 52 ch pesant 155 kg, performance peu commune
à l'époque. Langley avait été très tôt convaincu que le moteur
à combustion interne était bien plus prometteur en matière de
rapport puissance / poids que le moteur à vapeur. Il mit donc
en chantier son nouvel appareil, destiné à emporter un pilote,
cette fois.
Le 7 octobre 1903, l'appareil était prêt pour un essai en
vol avec pilote. De construction soignée, l'aéroplane de Langley
était semblable dans ses grandes lignes aux modèles précédents:
deux ailes monoplanes en tandem qui encadraient les deux hélices
actionnées par le moteur placé en position centrale. Manly installé
à bord, l'aéroplane fut catapulté, mais piqua rapidement dans
le fleuve, sans grand dommage pour le pilote et pour sa machine.
L'accident fut attribué à un accrochage de hauban de l'appareil
à un des apparaux de la plate-forme flottante.
Langley décida de recommencer son expérience le 8 décembre 1903.
Cette fois, dès le lancement, la machine se dressa verticalement,
les plans arrière se disloquèrent et l'appareil plongea dans
le fleuve, la structure n'ayant pas résisté aux efforts du
décollage et à la puissance du moteur. L'appareil était désormais
irrécupérable et les fonds complètement épuisés.
Neuf jours plus tard, le 17 décembre, Wilbur et Orville Wright
réussissaient là où tant d'autres avaient échoué.
Il est certain que Samuel Langley joua un rôle important dans
l'histoire de l'aviation aux Etats-Unis. Toutefois il
convient de rappeler qu'à l'opposé des frères Wright,
il s'était énormément investi dans la question de la motorisation,
sans guère se préoccuper des questions de pilotage. Même si "l'aérodrome"
avait volé, il eût été ingouvernable.
Samuel Langley ne se remit pas de son échec et mourut découragé
le 28 février 1906. La gloire, il y accédera à titre posthume,
lorsqu'en 1917, les Etats-Unis donneront son nom à l'une
des bases aériennes les plus prestigieuses du territoire américain,
celle qui deviendra le centre d'essais du NACA, puis de la
NASA.
©
Aérostories, 2000.
|
|