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La solution: le B-29 "Superfortress".

par  Philippe Ballarini

Avec ses 14,5 tonnes de bombes incendiaires, le raid de Doolittle, pour audacieux qu'il fût, n'avait qu'une valeur symbolique. La perspective de bombardements stratégiques efficaces réclamait d'autres moyens. On convoya des B-24 "Liberator" vers la Chine via l'Afrique et l'Inde, mais les aéroports chinois étaient tombés aux mains des Japonais avant qu'ils ne fussent à pied d'œuvre.

Ni les B-17 "Flying Fortress", ni les B-24 "Liberator", utilisés dans le soutien des forces terrestres comme arme tactique, ne disposaient de l'autonomie suffisante pour effectuer des bombardements stratégiques sur l'archipel japonais. Pour les Américains, la solution résidait donc dans la conception et la construction d'un bombardier "hemisphere defence", capable d'emporter 10 tonnes de bombes sur plus de 8000 km. Cet appareil sera le B-29 "Superfortress".

Cet avion, qui était un authentique défi technologique, nécessita une équipe de 750 ingénieurs pour sa conception. Dans un fuselage cylindrique, dix hommes d'équipage étaient installés dans une cabine pressurisée. En effet, le B-29 devait pouvoir opérer à une altitude de 30 000 pieds (9150 m), dans une atmosphère raréfiée, relativement abrité des chasseurs ennemis. Les tourelles n'étaient donc plus habitées, mais télécommandées depuis l'habitacle, à l'exception de la tourelle de queue, pressurisée, où était logé un mitrailleur.

Le 29 juin 1943 décollait le premier B-29 de série. Cet appareil, qui jouera un rôle de premier plan dans la seconde guerre mondiale, était propulsé par quatre moteurs en étoile Wright R-3350 de 2200 chevaux. Ce moteur était capricieux et peu fiable, ce qui n'arrangeait pas les choses au regard des conditions extrêmes dans lesquelles il était appelé à servir. Les équipages de B-29 devraient attendre la fin du conflit pour pouvoir lui faire confiance.

Avant la reconquête d'îles du Pacifique suffisamment proches de l'archipel nippon par la stratégie du "saute mouton" adoptée par l'état-major américain, le B-29 ne pouvait utiliser que des base situées en Inde. Or, en dépit de son exceptionnelle autonomie, il n'était pas envisageable de bombarder le Japon directement depuis les bases indiennes. Il fut donc décidé d'utiliser une procédure assez complexe, mettant à contribution des aérodromes chinois. Lorsqu'à l'été 44, des B-29 modifiés arrivèrent en Inde, ils trouvèrent des terrains complètement inadaptés, à tel point que les pilotes avaient surnommé l'un d'eux (Charra) "l'antichambre de l'enfer". Ce n'était pourtant qu'un avant-goût de ce qui les attendait en Chine. Il fallut amener sur les bases chinoises la logistique de soutien par voie terrestre.

Il fallut transformer ensuite en avions-citernes  une vingtaine de B-29 pour approvisionner les bases en territoire chinois. Le ravitaillement commença le 24 avril 1944. Le fonctionnement fantaisiste des moteurs Wright entraîna la perte de douze appareils au-dessus du "hump", la "bosse" de l'Himalaya.

Le premier bombardement stratégique du Japon visait les usines sidérurgiques de Yawata, sur l'île de Kiù Siù, à l'extrême sud-ouest du Japon. Dans la nuit du 14 au 15 juin 1944, soixante-huit  "Superfortress" décollèrent de leur base chinoise. Une s'écrasa au décollage, six durent larguer leur bombes prématurément pour ennuis mécaniques, sept autres lancèrent leurs bombes hors cible. La DCA abattit un B-29 et en endommagea six autres. Au retour, deux appareils se perdirent dans les montagnes chinoises. Lourd tribut pour une opération qui n'avait pas été très efficaces en raison de mauvaises conditions météo au-dessus de Yawata! De surcroît, il fallait attendre six semaines avant que les stocks de carburant en Chine soient réapprovisionnés. Toujours est-il que les bombardements du Japon commençaient réellement .

En dépit des perfectionnements apportés lors des raids suivants, il fallut se rendre à l'évidence: il fallait abandonner l'idée des bombardements menés depuis la Chine pour s'installer aux îles Mariannes, dans le Pacifique Centre. Cette option était séduisante, car le ravitaillement pouvait s'y faire par voie directe, depuis les États-Unis.

Comme prévu, Guam, Tinian et Saïpan avaient été prises à la mi-août 1944. L'ouverture de bases aériennes américaines dans ces îles de l'archipel des Mariannes bouleversait la donne et sonnait l'heure des bombardements massifs contre tout le Japon.

© Aérostories, 1999

[ suite ]

XB-29 A : la toute première "Superfortress" jamais construite.

USAF Archives Museum                  Clic

Construction de cabines pressurisées dans l'usine de Renton . C'est le fait que les cabines soient pressurisées qui permettra aux B-29 d'atteindre 30000 pieds.
USAF Archives Museum     Clic

L'usine de Wichita (Texas): des hangars aux dimensions titanesques pour la construction en série des B-29. 
USAF Archives Museum                    Clic

Affiche de propagande US.

L'effort de guerre américain nécessita une mobilisation importante des civils qui achetaient des "bons de guerre" destinés à financer la constitution d'un énorme arsenal militaire.
U.S.National Archives

Un équipage de B-29 "Superfortress" se prépare avant un départ en mission.
USAF Museum Archives       Clic