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VTOL/ADAV:
Les appareils à décollage et atterrissage verticaux

7: ADAV: les VTOL à la française.

Si l'on remonte à Chappedelaine on s'aperçoit que la tradition française du VTOL tourne autour de la réaction et a contrario l'absence quasi-complète de solutions VTOL à base de rotors dans notre ménagerie nationale à part quelques brevets exotiques et le petit N 500.
Après les turbines de Chappdelaine (voir chapitre 1) on trouve les trompes à pompe de Eduard-Alcide Guerre dans un très beau (????) brevet de 1937 pour une curieuse machine qui semble une dernière itération de l'Albatros de Robur…Les trompes orientables qui sont censées soulever l'engin puis le propulser paraissent encombrantes en diable mais préfigurent les tuyères du Harrier : en effet ici le moteur entraîne des pompes à air qui restent fixes; seules les pompes étant mobiles. Y-a pas à dire un vrai engin de...Guerre.
Marcel Hughes proposa lui un système à rotors rétractables dans les ailes, finalement très banal par rapport au bipoutre de Pierre Boudier (1942) où les deux poutres arrières étaient articulées et se relevaient en vol pour caréner les deux rotors bipales. Cet inventeur avait baptisé son brevet " perfectionnement apportés aux aéronefs munis d'hélices sustentatrices susceptibles d'être immobilisées en vol "...comme si ce type d'aéronef était parfaitement banal. A l'autre extrême des libellés savourons le simple " avion perfectionné " d'Albert Léon Jullian (Septembre 1939...) sorte de hanneton à géométrie variable et à rotors éclipsables sous des sortes d'élytres (pour ce qu'on peut comprendre des croquis du brevet)...
Le VTOL ne décolla vraiment en France que sous l'impulsion d'un émigré, récupéré comme bien d'autres à la fin de la guerre. Ancien de Peenemünde et de BMW, Von Zborowski, arriva avec une connaissance certaine des réacteurs, un intérêt pour les propulsions exotiques genre statoréacteur et fusée et une idée force : l'aile annulaire.
Les premiers essais visèrent d'abord à s'assurer qu'un VTOL à réaction fonctionnait et était pilotable : ce fut l'ATAR Volant , un gros tuyau basé sur le fameux réacteur ATAR mais adapté pour fonctionner à la verticale. L'engin ébahit les foules au Salon du Bourget de 1955 mais restait un "démonstrateur technologique". Ensuite il fallait prouver qu'un avion complet, avec l'aile annulaire chère au concepteur du projet pouvait voler : ce fut le Coléoptère "Y". Une autre cellule, sans l'aile annulaire fut installée sur un train pour tester le vol à basse vitesse (c'est à dire quand l'avion tient sur le jet de son réacteur au moment de l'atterrissage ou du décollage). Pendant que les tests se poursuivaient le Bureau Technique Zborowski étudiait les applications possibles du concept à des chasseurs supersoniques, des bizjets légers (Hanneton), des missiles (Lucane) etc…et la SNCASO concevait en 1955 un ersatz de Triebflugel complètement dépassé…et donc qui ne mena à rien. Le problème du Coléoptère c'est qu'il venait en une période de restriction budgétaire (Guerre d'Algérie oblige) qui avait déjà torpillé tous les projets d'intercepteurs à stato ou à fusée de l'époque. Il suffit donc d'un beau crash (dont les causes ont été discutées par les historiens, certains avançant que l'on était prêt du but puisqu'au moment du crash, l'appareil avait presque réussi sa transition vers le vol horizontal alors que d'autres émettent des doutes sur le concept même d'aile annulaire ) pour mettre fin au projet et à tous les espoirs entomologiques du BTZ. Aujourd'hui ne reste plus de l'aventure qu'un ATAR Volant au Musée de l'Air, quelques desk-models ou maquettes de soufflerie de-ci de-là et les Aventures de Dan Cooper et de Spirou et Fantasio (Zorgloptère) (Bob Morane hérita aussi d'un Coléoptère sur la couverture des disques d'adaptations jouées de ses romans).
En parallèle la plupart des constructeurs de l'époque s'essayèrent au " tail-siter " avec des fortunes diverses, mais tous trop " bédé-esques " pour quitter la planche à dessin : Bertin 7v2 (je n'ai pas dit V7 !), Morane Saulnier Statodyne , SO " Dever " (ressemble à la fusée du film " King Ghidorah ") ou Coléoptère à voilure delta (pourquoi ici ne puis-je m'empêcher de penser au club de maquettistes fous anglais qui avait réalisé un BV 141 symétrique ?) En effet parfois nos ingénieurs se basent sur leurs études précédentes… Nous faillîmes donc avoir droit à un Griffon VTOL (sans stato) et nous eûmes un Mirage " Balzac " fruit des amours d'une cellule de Mirage prototype (001 d'où le nom tiré du mnémonique du numéro de téléphone d'une agence de pub au temps où les numéros de téléphone parisiens  étaient préfixés par le nom de leur standard : Balzac 0 0 1) qui ne vola pas si mal (malgré le  deux crashes) et déboucha sur le Mirage III V, seul VTOL , encore aujourd'hui à avoir dépassé Mach2. Les Mirage utilisaient des réacteurs Rolls-Royce dédiés (comme le Short SC-1) et peuvent donc être vus comme en retrait par rapport au projet " Cavalier " de Dassault à tuyères orientables. Au moins ils volèrent eux... Le Mirage III V fut le seul appareil du concours de l'OTAN NMBR3 à être construit et fut d'ailleurs déclaré vainqueur ex aequo avec le Hawker P1154, le Harrier supersonique.
Mentionnons également le très original SE X-115 (encore une désignation à la Buck Danny) à jets basculants placés en bouts d'aile qui était envisagé pour l'aéronautique navale.
Tout cela passa à la trappe victime de leur complexité, de l'effet de mode (on voyait poindre la géométrie variable et seuls Republic et Fairchild et leurs alliés Germano-hollandais osèrent mélanger les deux...) des réductions de crédit (Guerre d'Algérie), et de l'abandon du programme OTAN NMBR3...
Pour la bonne bouche mentionnons aussi la fusée postale Matra des années 50 au rotor déployable en vol (on décolle sur la fusée, on atterri en autorotation sur le rotor...rien n'est simple), une idée piquée aux Américains...et le Ludion , version française de la ceinture volante...

©
Aérostories, 2001.

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par Jean-Christophe Carbonel

Les Français ont aussi construit un VTOL à hélice carénée : le Nord 500 mais qui a très peu volé et uniquement sous élingues. Curieusement il a inspiré le Shado Gyro de Derek Meddings qui a un temps d'écran tout aussi réduit dans la série UFO Maquette de soufflerie.
Photo de l'auteur                           Clic

Plusieurs constructeurs français proposèrent des "tail sitters". L'ingénieur de chez Morane-Saulnier pensait obtenir une plus grande ergonomie d'opération en construisant un bi-réacteur dont l'un des moteurs avait des tuyères placées au-dessus du CG de l'appareil ce fut le Stratodyne qui ne dépassa pas lui non plus l'étape de la planche à dessins. Maquette au 1/72ème de l'auteur.              Clic

Le plus réussi des tail-sitters français fut le SNECMA /BTZ Coléoptère qui eut un retentissement mondial et influença les auteurs de fiction de l'époque. Ici l'une des variantes plus ou moins civiles est illustrée sur la couverture du magazine Mécanique Populaire. Notez le camion de transport…complètement fictif.
Illustration : Mécanique Populaire         Clic

Mirage III V : le premier (et unique) VTOL à atteindre Mach2                           Clic

Même Roland Payen proposa un VTOL tail sitter sous le nom de PA 59 Aldébaran (Photo archives Payen via Pierre Gaillard)    Clic

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