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L'Armée de l'Air de l'armistice.

par Philippe Ballarini

4. Le Levant

Au Moyen-Orient, la Syrie et le Liban étaient sous mandat français, respectivement depuis 1920 et 1926. La Palestine et la Transjordanie, quant à elles, étaient sous mandat britannique. Ce qu'on appellera plus tard "affaire de Syrie" prit sa source dans un coup d'état en Irak, le 1er avril 1941. Il fut vite évident que le maître d'œuvre du complot, Rachid Ali el-Gailani, n'hésiterait pas à faire appel aux forces de l'Axe. Cette situation était dans la plus haute gravité aux yeux des britanniques: non seulement la Mésopotamie représentait pour eux une zone hautement stratégique, mais une bonne partie de son pétrole provenait de puits irakiens. L'Irak coupa le pipe-line reliant les puits de l'Iraq Petroleum Company à Haïfa, en Palestine et envoya les précieux hydrocarbures à destination de Tripoli, sous contrôle français. Compte tenu de la politique de collaboration avec l'Allemagne dans laquelle s'était engagé le régime de Vichy, c'était mettre le carburant à disposition des forces de l'Axe. (Notons toutefois que les Britanniques avaient réduit de façon drastique le débit des  oléoducs dès le 25 juin 1940.)

L'aviation de chasse n'était constituée que d'une unité qui était arrivée à Rayack  en mars 1940, équipée de Morane-Saulnier MS 406. Cette unité qui ne put prendre part à aucun combat apprit dans l'impuissance la défaite de juin 1940 et l'armistice. Quelle frustration pour ces hommes prêts à se battre de ne pouvoir que se livrer à des exercices! Aussi nombreux furent ceux qui étaient fermement décidés à continuer le combat au côté des anglais, en dépit de l'effet désastreux de Mers el-Kébir. Le commandement eut bien des difficultés à maintenir les pilotes du GC 1/7 dans le cadre d'une armée de l'Air appartenant désormais à un pays menant ouvertement une politique de collaboration avec l'Allemagne. Le futur commandant du groupe Normandie-Niemen, le capitaine Tulasne, fut un transfuge de Rayack qui profita d'une mission d'entraînement pour s'échapper. On le signala comme disparu en mer.
La situation au Moyen-Orient fut rapidement explosive. Sur ordre de l'amiral Darlan, le général Dentz, haut-commissaire en Syrie, non seulement livra des armes françaises à Rachid Ali, mais ouvrit les portes des aérodromes libano-syriens à la Luftwaffe.

Le 15 mai 1941, les Britanniques ouvrirent les hostilités en attaquant des terrains français, espérant doute détruire des avions de la Luftwaffe. L'armée de l'Air du Levant fut renforcée d'effectifs provenant d'Afrique du Nord (d'ailleurs ravitaillés dans des bases tenues par les italiens ou les allemands). Au légalisme qui était répandu dans les troupes du Moyen-Orient vint se greffer la rancœur de ceux qui, comme le lieutenant Cuffaut,  avaient survolé la rade de Mers el-Kébir, assistant au massacre. Il verra sur le terrain d'Homs les Anglais jeter des tracts invitant les aviateurs français à ne pas les combattre et, le lendemain, des appareils aux mêmes marques attaquer le GC I/7, tuant deux pilotes et deux mécanos.

Les forces de l'armée de l'Air du Levant n'étaient pas très puissantes, mais les effectifs de la R.A.F. n'étaient guère plus brillants. On y vit encore ces vieux biplans Gloster "Gladiator" et autres Fairey "Fulmar", proies faciles pour les D-520.L'invasion des états du Levant par des troupes anglaises appuyées par des éléments de la France Libre commença le 8 juin 1941. Dès le début des opérations, l'armée de l'Air fut utilisée pour le soutien des forces terrestres, les unités de bombardement attaquant blindés et infanterie le long de la côte libanaise, la chasse mitraillant les troupes anglaises pendant que les
Glenn Martin attaquaient la flotte britannique qui pilonnait les troupes dans la région de Saïda.
Bloquées de toutes parts, les troupes vichystes capitulèrent, ayant refusé toute aide allemande.
L'armée de l'Air, qui avait engagé 279 appareils, en perdit 179, la plupart au sol en non en combat aérien. Globalement, avec plus de 3000 sorties, l'armée de l'Air du Levant s'était montrée très active, avec des appareils qui ne pouvaient plus faire face.
Les appareils restant en état connurent des fortunes diverses, certains ralliant la France, d'autres l'Afrique du Nord, d'autres encore équipant les groupe F.A.F.L. (Forces Aériennes Françaises Libres).

©
Aérostories, 2000.

[ suite ]

Un bel alignement de Morane-Saulnier MS 406 sur le terrain de Rayack, au Liban. C'est de cette base et à bord de l'un de ces appareils que s'échappera en décembre 1940 le Capitaine Tulasne, futur commandant du "Normandie-Niemen"  pour rejoindre la Palestine.

Document S.H.A.A.                 Clic

Juin 1941: attaque d'un aérodrome par des Tomahawk britanniques. On reconnaît au premier plan le nez d'un LeO-45.  Document S.H.A.A.   Clic

Sur un aérodrome de Syrie, un LeO-451 endommagé par un raid aérien britannique est en cours de réparation.  Document S.H.A.A.  Clic

Des mécaniciens à l'entretien en 1942 sur un Bloch MB-152, peu de temps avant la dissolution de l'Armée de l'Air de l'armistice. Document S.H.A.A.   Clic